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Auteurs : Antonia Bernard, Nike K. Pokorn, Mojca Schlamberger-Brezar

  

3.1. Cadre général introductif.

3.1.1 À quel moment apparaît dans votre littérature la quête de modernité incarnée par les avant-gardes littéraires ?

Au tout début du XXe siècle, plus précisément en 1899, où deux des quatre « modernes » (Oton Župančič, Ivan Cankar, Dragotin Kette et Josip Murn-Aleksandrov) publient leurs premiers recueils de poésie. Influencés par Die Moderne de Vienne, Oton Župančič (1878-1949) et Ivan Cankar (1876-1918) délaissent les thèmes traditionnels patriotiques et campagnards) pour la vie urbaine et pour une nouvelle esthétique. Les poètes maudits Kette et Murn-Aleksandrov, morts très jeunes, participent à cette modernisation de la poésie.

Dans la littérature slovène fin de siècle, la modernité est représentée par la confluence de plusieurs courants artistiques. L'époque est marquée par un pluralisme stylistique, l’unité dans la diversité, avec pour point de départ une nouvelle relation établie avec la tradition (Kos 1987, p. 146; Bernik 1993, p. 13). Les théories philosophiques et les tendances et courants esthétiques constitutifs de la modernité ne pénétrèrent pas dans l’espace slovène en se succédant, comme dans la littérature de l’Europe occidentale, mais surgissent en même temps, liés les uns aux autres. Selon Bernik (Bernik 1983, p. 156; 1987, p. 8), la pénétration simultanée de ces courants remplace la diachronie habituellement liée à l’instauration d’une esthétique nouvelle.

L’œuvre entière d'Ivan Cankar est imprégnée de ces courants et révèle cette diversité de la modernité : dans la prose courte Vinjete (Les Vignettes) et dans le recueil poétique Erotika (Érotique), on trouve des éléments du décadentisme comme les états sans désir, l’ennui, la nausée, l’instabilité mentale,  l’excentricité (Bernik 1993, p. 14-15). On trouve aussi de l’impressionnisme dans son recueil de poésies Erotika (1899) et, partiellement, dans le roman Hiša Marije Pomočnice (La maison de  la Mère  miséricordieuse de Dieu, 1904). Le symbolisme, premier courant littéraire au sein duquel le développement de la littérature était en phase avec le reste de l’Europe (Bernik 1985, p. 155; 1988, p. 168), apparaît dans le roman Na klancu et partiellement dans Hiša Marije Pomočnice. Dans le recueil d'histoires courtes Podobe iz sanj (Les images du rêve) apparaissent déjà les bases de l’expressionnisme (Bernik 1993, p. 21-23).

Quant aux vraies avant-gardes, elles commencent avec l’époque de l’expressionnisme. Moins typiquement représenté en France, mais très fort dans son expression au sein de tous les arts liés au monde germanique et slave, l’expressionnisme se manifeste en Slovénie avec plusieurs auteurs qui déterminent certains événements :

a) Le printemps de Novo mesto novomeška pomlad

Le printemps de Novo mesto (Novomeška pomlad) est l’appellation qu’on donne à la manifestation culturelle et artistique de 1920 qui annonçait les courants modernistes et avant-gardistes de l’art slovène, aussi bien en peinture (avec Božidar Jakac) qu’en littérature (Anton Podbevšek, Miran Jarc), musique (Marij Kogoj) et architecture.

b) Le représentant le plus radical de l’avant-garde était Anton Podbevšek (1898-1981), lié aux courants expressionniste et futuriste. Son recueil de poèmes L’homme aux bombes (Človek z bombami 1925) a suscité des critiques et des controverses.

c) Les avant-gardes culminent avec l’œuvre de Srečko Kosovel (1904-1926). Sa poésie contient des éléments du surréalisme et du dadaïsme, oscillant entre avant-garde et traditionalisme, tout en reflétant les mouvements européens contemporains comme le futurisme, le zénitisme, le constructivisme, le dadaïsme, le surréalisme et l'expressionnisme (cf. Pokorn 1998).

 

3.2. La pratique de la traduction

Qui traduit ?

3.2.1. Qui sont les traducteurs ? (Origine sociale, formation, langue maternelle, statut social, conditions de travail et de rémunération ? Sont-ils reconnus en tant que traducteurs, s’agit-il de leur activité principale ? Etc.)

L’un des plus grands traducteurs de cette première modernité est justement le poète Oton Zupančič, qui traduisit plusieurs pièces de Shakespeare, de Molière, de Schiller, des textes de Goethe, de Dickens, de Pouchkine, etc. Il travaille comme directeur du théâtre de Ljubljana et les pièces qu’il traduit peuvent se retrouver au répertoire. Cankar fit une première traduction de Hamlet. Entre les deux guerres le nombre d’œuvres traduites augmente. On ne trouve pas de traducteurs professionnels, ce qui peut s’expliquer d’une part par le faible nombre de lecteurs (il y a moins de deux millions de Slovènes). Les traducteurs sont toujours des poètes et des écrivains qui, mis à part Ivan Cankar, ne vivent pas de leur plume. Les traductions leurs sont payées au cas par cas, en accord avec l’éditeur. Cet argent ne leur permet pas de vivre, il peut parfois les aider un peu pendant les périodes de « vaches maigres ».

On trouve parmi les traducteurs également l’historien de la littérature Josip Vidmar (1895-1992) et Janez Gradišnik (1917-2009), professeur de lycée et spécialiste de la langue slovène.

Cette situation changera complètement après la Seconde Guerre mondiale, quand la traduction littéraire deviendra un moyen de subventionner les grands auteurs.

 

Que traduit-on ?

3.2.2. Quels genres de textes traduit-on ?

De la poésie, du théâtre, des romans.

3.2.3. Peut-on constater à cette époque une réduction de l’écart entre la date de parution d’une oeuvre dans la langue originale et la traduction ?

Oui, encore que les grands classiques sont toujours beaucoup traduits. Ainsi le poète Alojz Gradnik, l’un des plus fins traducteurs de Dante et de Pétrarque, traduit également Tagore.

À cette époque, on traduit les grandes œuvres de l’Antiquité grecque et romaine (par exemple Euripide : Hippolytos 1925 ; Sophocle : Kralj Oidipus, 1922, Antigone, 1924) et les classiques de la littérature européenne (Molière : Namišljeni bolnik, 1925, Skopuh, 1927 ; Shakespeare : Macbeth, 1921, Othello, 1923 ; Flaubert : Madame Bovary, 1915; Dickens : Oliver Twist, 1911; Dostoïevski : Zapiski iz mrtvega doma, 1912, etc.), aussi bien que les auteurs plus modernes comme George Bernard Shaw (Saint Joan, 1928), Maurice Maeterlinck (Modra ptica, 1923), Oscar Wilde (Pravljice, 1919 ; Lady Windemere’s Fan, 1924), Henryk Sienkiewicz (Z ognjem in mečem, 1892), Maxime Gorki (Mati, 1912), Guy de Maupassant (Lepi striček (Bel-Ami), 1912), Tagore (Rastoči mesec, 1912 ; Gitandžali, 1924), Upton Sinclair (Alkohol, 1933; Dolarji, 1933), Romain Rolland (Peter in Lučka, 1937), Frank Wedekind (Pomladno prebujenje, 1934), Jean Cocteau (Šola za vdove, 1936), André Gide (Vatikanske ječe, 1934), François Mauriac (Kačja zalega, 1933), Antoine de Saint-Exupéry (Veter, pesek in zvezde, 1943). (Pokorn : à paraître). (NB: les titres originaux et/ou français sont cités en 3.2.5). Nous pouvons donc constater que le souci d'apporter des idées neuves par les traductions est toujours présent et que beaucoup de traductions sont faites presque simultanément avec (ou très peu de temps après) la parution de l’original.

 

3.2.4. Y a-t-il à cette époque des changements dans la géographie de la traduction (origine des oeuvres traduites) ? S’ouvre-t-on à des littératures non traduites jusque là ? Si oui, lesquelles ?

Les traductions au XIXsiècle (au total 316) sont en majorité faites à partir de l’allemand (45,6 %), suivent les traductions des langues slaves (russe, polonais, tchèque, slovaque, serbe, croate – 34 % toutes langues confondues), du français  (9,5 %) et de l’anglais. La plupart des œuvres écrites en d'autres langues que l’allemand ont été traduites à partir de la traduction allemande (p. ex. H. Beecher Stowe : Uncle Tom’s Cabin ; Hans Christian Andersen, Contes) (Pokorn : à paraître).

Au XXsiècle, la situation change : le nombre de traductions augmente (il est même multiplié par quatre au cours des quatre premières décennies du XXsiècle : de 1900 à 1944, 1126 traductions sont publiées). On voit la prédominance des traductions de l’allemand (21,4 %), suivent la littérature anglaise (même si la plupart des traductions nous parviennent par le biais de l’allemand, p. ex. les traductions de Shakespeare par Župančič et Cankar), puis la littérature française (15,5 %). La littérature russe prédomine parmi les langues slaves (12 %), mais il y a aussi des traductions du tchèque, du polonais, du croate et du serbe (16 % toutes langues confondues). 

La littérature russe est de plus en plus traduite surtout entre les deux guerres. Josip Vidmar traduit Gogol, Pouchkine, Tioutchev, Tourgueniev, Tolstoï, etc. L’écrivain Vladimir Levstik traduit également Tolstoï et Dostoïevski. On se met à traduire également les auteurs des autres peuples constitutifs de la Yougoslavie.

D’autre part, après la séparation d’avec l’Autriche et le monde germanique, qui a servi de base à la culture slovène (rappelons que les Slovènes faisaient traditionnellement leurs études à Vienne ou à Graz, la première université slovène a été fondée seulement en 1919), on se tourne davantage vers l’Occident, notamment vers la France, grande amie de la Yougoslavie. Ainsi Božo Vodušek traduit des poèmes de Baudelaire et de Valéry et la prose d’A. France.

 

3.2.5. Citez quelques textes emblématiques traduits à cette époque (s’il y en a), titres et dates.

Homère, Iliade, 1916;

Sophocle, Œdipe roi (Kralj Oidipus), 1922,

Sophocle, Antigone, 1924;

Moliere, Le Malade imaginaire (Namišljeni bolnik), 1925; 

Moliere, L'Avare (Skopuh), 1927;

Shakespeare, Macbeth, 1921;

Shakespeare, Othello, 1923;

Gustave Flaubert, Madame Bovary, 1915; 

Charles Dickens, Oliver Twist, 1911;

Fedor Dostoïevski, Souvenirs de la maison des morts (Zapiski iz mrtvega doma), 1912;

George Bernard Shaw, Saint Joan, 1928;

Maurice Maeterlinck, L’oiseau bleu (Modra ptica), 1923;

Oscar Wilde, Le Prince heureux et autres contes (Pravljice), 1919 ; L'Éventail de Lady Windermere, 1924;

Henryk Sienkiewicz, Par le fer et par le feu (Z ognjem in mečem), 1892;

Maksim Gorki, La Mère (Mati), 1912; 

Guy de Maupassant, Bel-Ami (Lepi striček), 1912.

Tagore, Gitanjali (Gitandžali), 1924;

Upton Sinclair, Alkohol, 1933, Dolarji, 1933;

Frank Wedekind, L'Éveil du printemps, tragédie enfantine (Pomladno prebujenje, 1934);

Jean Cocteau, L'École des veuves (Šola za vdove), 1936;

André Gide, Les Caves du Vatican (Vatikanske ječe), 1934;

François Mauriac, Le nœud de vipères (Kačja zalega), 1933;

Antoine de Saint-Exupéry, Terre des hommes (Veter, pesek in zvezde), 1943.

 

Comment traduit-on ?

3.2.6. Formule-t-on des exigences concernant le respect du texte traduit, la mention du nom de l'auteur, du traducteur, la nécessité de traduire directement à partir de la langue originale ?

Tout cela semble aller de soi dans un pays qui a toujours un grand respect de la langue et de la littérature. Le traducteur, dans la majorité des cas un auteur connu, ne peut pas se permettre de faire une traduction bâclée.

Un grand nombre de textes sont traduits par l’intermédiaire de l’allemand, p. ex. les traductions du danois (Hans-Christian Andersen) et de l’anglais (H. Beecher Stowe, Jonathan Swift). Les traducteurs s’aident des traductions allemandes. C’est le cas par exemple d'Oton Župančič qui traduit Shakespeare (Pokorn 2012).

 

3.2.7. Trouve-t-on des réflexions et/ou des débats sur la traduction ? Sur quoi portent-ils ?

À la fin du XIXe siècle (en 1896), l’écrivain et critique littéraire le plus influent de l’époque, Josip Stritar, écrit dans la revue littéraire Ljubljanski zvon :

« Pour ce qui est des traductions, mon opinion est la suivante : la traduction seulement faute de mieux. La traduction est toujours une marchandise étrangère ; que celui qui le peut écrive des choses originales. Seul ce qui est original, de chez nous, nous appartient. » (Josip Stritar, Ljubljanski zvon XVI/I (1896), p. 20). Ce rejet de la traduction vient du fait que la littérature slovène avait besoin de se constituer et de se profiler contre la littérature allemande dominante. Mais il est vite surmonté: dès le début du XXe siècle, les cercles littéraires commencent à accepter la traduction.

Un rôle très important est joué par Oton Župančič, le personnage central de la poésie moderne slovène, qui établit un programme de traduction des pièces de théâtre des littératures d'Europe occidentale (et fait lui-même les traductions). Suivent d’autres auteurs comme J. Vidmar.

 

3.2.8. Certains traducteurs écrivent-ils des préfaces explicitant leur pratique ainsi que le choix des textes qu’ils traduisent ?

Les préfaces rédigées par les traducteurs ne sont pas rares, on en trouve déjà au XIXe siècle. Au début du XXe siècle se développe la critique de la traduction, publiée dans la revue littéraire Ljubljanski zvon (Pokorn à paraître). 

 

3.3. Le rôle culturel de la traduction

La traduction et la langue

3.3.1. Statut de la langue écrite à l’époque (existe-t-il une norme unique pour cette langue ? Coexistence éventuelle avec d’autres langues ?)

La troisième époque de l'histoire de la langue slovène commence avec la nomination de Miklošič comme professeur à l’université de Vienne (1850) et l’indépendance de l'étude universitaire du slovène, et dure jusqu’au début de l’activité de la première génération des étudiants de Miklošič  qui commencent à s’affirmer en tant que linguistes (Krek, Škrabec, Štrekelj, Valjavec, Pleteršnik, Oblak, Murko). C’est une époque qui se prolonge aussi au XXsiècle avec A. Breznik et J. Šolar (Grammaires du slovène publiées en 1916, 1934, 1956) (cf. Orožen 1996, p. 10-13).

À partir de cette époque, la slovénistique s’affirme comme une discipline scientifique, et les questions relatives au slovène sont traitées par les linguistes ce qui entraîne des recherches dans différents domaines comme la dialectologie, l’étymologie, la phonologie historique, la morphologie, qui aident à la normalisation de la langue littéraire et de la stylistique des genres.

 

3.3.2. La traduction joue-t-elle un rôle dans l'évolution de la langue ?

Les traductions aident à co-former la langue. Le dictionnaire de la langue slovène, Slovar slovenskega knjižnega jezika, constitué à partir d'un corpus de textes de tous les genres, donne un grand nombre d’exemples issus de traductions. Sont spécialement appréciées les traductions des textes de l’Antiquité, surtout celles dues au traducteur Anton Sovre.

La traduction et la littérature

3.3.3. La traduction joue-t-elle un rôle dans le développement des formes, des genres et des courants littéraires, notamment dans l'avènement de la modernité ?

C’est certain. Aussi bien les traductions de Župančič, très nombreuses, que celles de Cankar sont orientées vers l’éveil de la culture du lecteur et vers la création de nouvelles affinités littéraires. 

La traduction et la société

3.3.4. À quelles fins traduit-on (esthétiques, commerciales, politiques, sociales) ?

Principalement esthétiques (traductions des œuvres classiques de l’Antiquité latine et grecque et du classicisme français), parfois sociales (traductions de Gorki) ou politiques (traductions de Marx, Engels). Beaucoup d’efforts sont investis dans l’affirmation de la littérature slovène.

3.3.5. Qui prend, en général, l’initiative des traductions (traducteurs ? éditeurs ? libraires ? mécènes ? pouvoir politique ou religieux ?)

Le traducteur lui-même ou l’éditeur, comme précédemment.

3.3.6. Quels sont les supports de publication et les modes de diffusion des traductions ?

Revues pour la poésie et les textes courts (Ljubljanski zvon et Dom in svet, les deux grandes revues littéraires d’avant 1945) et les monographies pour les romans.

3.3.7. Y a-t-il des différences à cet égard avec la littérature originale ?

Non.

3.3.8. Quel est le public des traductions ? Est-il différent du public de la littérature originale ?

Non.

3.3.9. Réception critique des traductions ?

Un nombre considérable de critiques paraissent dans la revue littéraire Ljubljanski zvon, mais aussi dans les quotidiens (p. ex. Jutro). La critique touche aussi les traductions des œuvres slovènes vers les langues étrangères, comme la traduction anglaise de Hlapec Jernej in njegova pravica (Le valet Jernej et son droit) d'Ivan Cankar (Prezelj, The Bailiff Yerney and his rights, Ljubljanski zvon, n° 50, p. 632-635 ; Vidmar, Josip, 1926, Hlapec Jernej v angleščini, Jutro (19. sept.), p. 11.)

3.3.10. Existe-t-il une censure visant spécifiquement des traductions ?

Au temps de la monarchie autrichienne, une censure officielle était en vigueur, avec un bureau de censure à Ljubljana. Les bibliothèques recevaient toutes les deux semaines les listes des livres interdits, jusqu’à l’abolition de la censure politique en 1848. Ensuite, la censure veilla surtout au respect des normes de décence et de moralité ; en 1899, l’évêque Jeglič fit brûler le recueil de poèmes d'Ivan Cankar Erotika.

Dans le Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes (à partir de 1918), la censure veillait au respect des normes morales. Tous les livres qui les transgressaient étaient notés dans les bibliothèques par une ligne rouge barrant la cote. 

3.3.11. Les modalités d’exercice de la traduction sont-elles influencées par les identités nationales, sociales, etc. (choix des textes, mode de traduire, langue de la traduction) ?

À la fin du XIXsiècle, Josip Stritar déconseillait la traduction, surtout la traduction des romans historiques allemands. On pouvait à la rigueur accepter les traductions des œuvres slaves. Ses consignes avaient pour but la création de nouveaux genres dans la littérature slovène originale (Stanovnik 2005, p. 67). Mais par la suite, la traduction a été considérée comme un enrichissement de la littérature originale slovène. 

Anton Prijatelj écrit en 1901 un traité, Puškin v slovenskih prevodih (Pouchkine dans la traduction slovène). Dans la seconde moitié du XIXsiècle, les critiques n’étaient pas très favorables aux traductions (Stanovnik 2005, p. 67). Prijatelj présente une étude critique élaborée qui élucide aussi la fonction de la traduction dans la littérature nationale. Dans l’introduction, il explique ses opinions qui sont contraires à celles de Stritar (qui, selon Prijatelj, aurait nui profondément à la qualité de la traduction et à la littérature slovène, ibid. p. 69). Ses thèses, à savoir qu’aucune traduction ne peut égaler l’original mais doit s’efforcer de lui ressembler, seront plus tard confirmées par les autres critiques de la traduction.

Le poète Anton Aškerc, dans sa préface à l’Antologie russe en traduction slovène (Ruska antologija v slovenskih prevodih), plaide pour la traduction qui rend possible la création de liens littéraires entre les nationas (Stanovnik 2005, p. 78).

Oton Župančič, avec ses traductions et sa liste d'œuvres à traduire, aide à rehausser la réputation de la littérature traduite en slovène.

Après la Seconde Guerre mondiale, des controverses apparaissent entre les traditionalistes et les modernistes.

Le critique central, Josip Vidmar, traditionaliste, affirme en citant Oton Župančič : «L’œuvre traduite doit être telle que si elle avait été écrite par un auteur slovène.»  Cette maxime reste valable même pour les générations modernes, p. ex. chez Janez Menart (Stanovnik 2005, p. 99).

 

3.3.12. Des traductions ont-elles joué un rôle dans l'évolution des idées et de la société ?

Oui, des traductions comme celle de La Mère de Gorki, ainsi que les traductions des textes théoriques et philosophiques de Friedrich Engels et Karl Marx (Manifeste du parti communiste, 1908, 1920, 1934) ont influencé le développement du mouvement communiste.

 

Bibliographie

Bernik, France. 1983. Slogovne tendence Cankarjeve črtice. Slavistična revija, 31, p. 269-279.

Bernik, France. 1987. Ivan Cankar: Monografska študija. Ljubljana: Državna založba Slovenije.

Bernik, France. 1993. Književnost slovenske moderne v evropskem kontekstu. Slavistična revija, 41, p. 13-23.

Kos, Janko. 1987. Primerjalna zgodovina slovenske literature. Ljubljana: Znanstveni institut filozofske fakultete, Partizanska knjiga. 

Orožen, Martina. 1996. Oblikovanje enotnega slovenskega knjižnega jezika v 19. stoletju. Ljubljana: Znanstveni inštitut Filozofske fakultete.

Pokorn, Nike K. 1998. « Beyond the Avantgarde and Expressionism: Srečko Kosovel’s Integrals. » Dans: Srečko Kosovel, Integrals, Litterae Slovenicae. Ljubljana: Društvo slovenskih pisateljev, Slovenski PEN in Društvo književnih prevajalcev Slovenije, p. 11-19. 

Pokorn, Nike K. 2012. Post-Socialist Translation Practices : Ideological Struggle in Children’s Literature. Amsterdam/Philadelphia : John Benjamins.

Schlamberger Brezar, Mojca. 2011. Les normes en traduction contre les normes en langue : le cas du slovène. Dans: GRASS, Thierry (ur.). Traduction des normes et normes de traduction dans l'espace européen : institutions et entreprises, (Scolia, 25). Strasbourg: Université de Strasbourg. 

Stanovnik, Majda. 2005. Slovenski literarni prevod 1550-2000. Ljubljana : Založba ZRC SAZU.