Auteur : Mirela Kumbaro

 

1.1. Cadre général introductif

1.1.1. Quel est le premier texte traduit ?

Les trois premiers textes traduits sont :

La « formule de baptême » du rite catholique de 1462, rédigé en dialecte guègue (dialecte du Nord), découverte à la Bibliothèque Laurentienne de Florence.

L’Évangile de Pâques selon les rites gréco-byzantins, en dialecte toske (dialecte du Sud), retrouvé à la Bibliothèque Ambrosienne de Milan, dont la date d’origine n’a pu être définie avec exactitude. Les scientifiques le situent cependant entre le XIVe et le XVe siècle.[1]

Le Missel de Gjon Buzuku, 1555, retrouvé dans les archives du Vatican (110 feuillets, 220 pages organisées en deux colonnes).

1.1.2. À quelle époque commence-t-on à traduire les textes religieux dans votre langue ?

La première traduction, précédemment citée, date de 1462, alors que le premier document fondamental traduit en langue albanaise est le Missel de 1555. Il existe, au XVIe et au XVIIe siècle d’autres textes religieux, traduits surtout en dialecte gege de la langue albanaise.

Par ailleurs, l’islam est une autre religion importante en Albanie suite à l’occupation des territoires albanais par les Ottomans. Or, les textes coraniques n’ont pas été traduits. On retrouve cependant quelques traces en 1820 des versets de mevlud traduits en albanais, mais écrits avec la graphie turque. Dans la préface, écrite en arabe, le traducteur (Hafiz Ali Ulqini) dit avoir entrepris ces traductions parce qu’il constatait que les gens, surtout les femmes et les enfants, ne comprenaient rien aux vers récités en turc et (encore moins) en arabe.[2] Cependant, la première traduction partielle du Coran a été faite en 1920 par un historien de religion orthodoxe, Ilo Mitke Qafezezi. Pour cette traduction, il est passé par la traduction anglaise de George Sale. Il a pu publier la première partie en Roumanie en 1921, alors que la deuxième partie a été publiée six ans après en Albanie, dans la ville de Korca. Dans la préface de cette édition le traducteur dit : « Faisons des livres religieux une pure question nationale. Il est inutile d’affaiblir les sentiments de notre esprit. Cela ne ferait aucun tort à l’Albanie d’aujourd’hui. C’est contre le fanatisme religieux qu’il faut se battre, pour tous les Albanais qui veulent une Albanie libre et civilisée. Sinon nous serons les perdants. »

D’autres traductions ont été faites dans les années 1930 par de bons connaisseurs du Coran comme Abdullah Zemblaku, Hafiz Ali Korça, Ferit Vokopola, etc.[3]

1.1.3. Date de la première traduction intégrale de la Bible ?

La première édition intégrale de la Bible en langue albanaise date de 1994, elle a été traduite par Dom Simon Filipaj sous le titre Bibla, Beselidhja e Vjeter dhe Beselidhja e Re. La traduction de l’Ancien Testament a été faite par les éditions Nova Vulgata Bibliorum SACRORUM, editio, Libraria editrice Vaticana 1979. La traduction du Nouveau Testament est une révision de la traduction précédente (Beselidhja e re – Krscanska Sadasnjot, Drita, Zagreb-Ferizaj (Kosovo) 1980).

Alors que la première traduction de l’Ancien Testament (datée de 1769), a été effectuée par Gregor de Durres, archevêque de Durres, une deuxième traduction a été effectuée par Theodor Hadji Filipi (1730-1805), surnommé Dhaskal Todri [4]. Toutefois, ils n’ont pas pu publier leurs manuscrits, qui ont malheureusement disparu.

Il existe aussi une édition des Évangiles en albanais, qui date de 1824, et une traduction du Nouveau Testament (1827) par Vangjel Meksi, revisés par Grigor Gjirokastriti. Ces publications ont été faites par les bons soins de Robert Pinkerton, avec le financement de la Société Biblique Britannique de Londres pour les Pays Étrangers (BFBS). Quarante ans plus tard, la même BFBS a encouragé une nouvelle traduction du Nouveau Testament en langue albanaise, souhaitant aussi la traduction de l’Ancien Testament. C’est Konstandin Kristoforidhi qui a, en 1866, traduit et publié en gege littéraire une partie du Nouveau Testament. Mais c’est en 1867 que la BFBS a approuvé sa traduction de l’Ancien Testament qui ne sera publiée pour la première fois en version intégrale que l’année suivante.

Au début du XXe siècle, les traductions de textes religieux en langue albanaise sont marquées par les publications des traductions de Fan Stilian Noli, fondateur de l’Église Orthodoxe des Albanais aux USA, et qui finit par devenir archevêque. Cette personnalité de l’histoire Albanaise a traduit plus de 6 000 pages de littérature liturgique et biblique (1908- 1955). Par ailleurs, pour son Église et la diaspora albanaise des USA, qui ne maîtrisait pas bien la langue maternelle, il a traduit en anglais onze livres liturgiques et trois œuvres de littérature bibliques (1943-1964). Tout cet énorme volume de traductions a été publié aux USA.[5]

 

1.2. La pratique de la traduction

Qui traduit ?

1.2.1. Qui sont les traducteurs (formation, langue maternelle, statut social, quelles sont leurs conditions de travail ? Sont-ils reconnus en tant que traducteurs, s’agit-il de leur activité principale ? etc.) ?

Les premières traductions ont été faites, naturellement, par des prêtres chrétiens catholiques pour la plupart, mais aussi par des orthodoxes. Leur langue maternelle était l’albanais. Ces prêtres traducteurs ont été surtout motivés par leur mission religieuse : diffuser la parole sainte dans la langue de leurs croyants afin de réunir le peuple autour de l’Église. Par leurs traductions, ils visaient également le clergé local qui n’était pas suffisamment instruit pour pouvoir lire et comprendre les textes religieux. Leurs conditions de travail étaient tout à fait modestes, ils étaient plutôt des curés de villages, mais ils ont pu quand même profiter des bibliothèques catholiques en Italie, surtout celle de Venise.[6] L’influence du Vatican est tout à fait évidente.[7] Ils ne sont évidemment pas reconnus en tant que traducteurs professionnels, car leur principale activité et ce par quoi ils sont identifiés est la mission religieuse.

Quand aux traductions du XIXe siècle, elles sont faites aussi par des intellectuels de l’époque, formés à l’étranger, qui avaient étudié aussi dans des écoles religieuses, étaient sensibles aux tendances de leur temps et engagés à travailler pour maintenir la langue et la culture nationales de l’Albanie qui existait dans le cadre dans l’Empire ottoman.

Ils ont travaillé comme traducteurs professionnels tout en étant très actifs dans les associations culturelle et patriotiques fondées par les Albanais vivant à l’étranger.

Le tableau est le même jusqu’à l’indépendance de l’Albanie en 1912.

Que traduit-on ?

1.2.2. Quels types de textes religieux traduit-on ?

Au départ, c’étaient surtout des textes accompagnant les rites religieux les plus fréquents : baptême, mariage, obsèques. On traduit également des fragments de textes liturgiques, des psaumes, des extraits de la Bible ou des Évangiles que les prêtres disaient lors de leurs messes habituelles. Les textes traduits se sont multipliés lors du XVIIIe et du XIXe siècle, ainsi que dans la première moitié du XXe siècle, à quoi s’ajoutent les textes musulmans.

1.2.3. Traduit-on à la même époque des textes profanes ?

Pas vraiment, on ne dispose pas de documents prouvant la traduction de livres de littérature profane. Les quelques abécédaires de Naum Veqilharxhi (1850, 1867)[8], qui ont été préparés pour faciliter la lecture des textes religieux traduits en albanais, ont eu pour uniques illustrations des extraits de la Bible ou des Évangiles. Dans les textes scolaires de 1890 on retrouve des fables adaptées de La Fontaine, traduites par Naim Frasheri, grande personnalité de la « Renaissance Albanaise ».  En 1896 il a traduit aussi le premier chant de L’Iliade d’Homère sans pouvoir aller plus loin, C’est surtout le début du XXe siècle qui met sur le devant de la scène la traduction de la littérature profane.

Comment traduit-on ?

1.2.4. À partir de quel texte-source ?

La Bible (Ancien Testament, Nouveau Testament), les Évangiles, des textes de doctrines de l’Église catholique, des textes de catéchisme, le Coran.

1.2.5. De quelle(s) langue(s) traduit-on ?

Les premières traductions ont été faites à partir du latin et de l’italien lorsqu’il s’agit de textes de la religion catholique et à partir du grec pour la religion orthodoxe.[9]

1.2.6. Passe-t-on par une langue relais ?

Dans les premières traductions, au XVe et au XVIe siècle, la traduction était faite directement du latin et de l’italien, ou du grec. Mais les chercheurs ont retrouvé quelque influence du serbe dans la traduction du Missel de Gjon Buzuku (1555).[10]

Les traductions du XIXe siècle ont été faites en passant par une langue relais, notamment l’anglais, surtout pour les abécédaires, les textes de l’Ancien Testament (1872) et l’Histoire des écritures sacrées, mais aussi le français pour les traductions faites par Vangjel Meksi. Pour la traduction du Coran le traducteur est aussi passé par l’anglais.

1.2.7. Si oui, celle-ci est-elle orale ou écrite ?

Elle est écrite.

1.2.8. Les traducteurs privilégient-ils un mode de traduire littéral pour les textes religieux ?

 

1.2.9. Comment justifient-ils leur pratique ?

Ils privilégient la traduction et l’interprétation du sens, car les traducteurs avaient pour objectif principal de rendre leurs textes compréhensibles à un large public. Ceci est d’autant plus vrai pour les premières traductions (1555)[11] que pour celles du XIXe siècle. Les chercheurs qui ont effectué la transcription de ces textes et ont effectué une comparaison minutieuse de ces traductions avec les originaux en latin, en italien ou en grec, sont arrivés à la conclusion qu’en général « la traduction est fidèle ; elle est digne de l’original, et ceci est d’autant plus précieux si on tient compte du fait que la langue maternelle du traducteur n’offrait pas autant de potentiel et de richesse que la langue de départ. On constate parfois que la traduction est assez libre, deux phrases ont fusionnées en une seule, la structure des phrases a complètement changé, sans que le texte albanais ne présente, cependant, des défaillances. Nous avons des raisons de croire que ces changements dans la forme et dans le contexte ont été faits intentionnellement par l’auteur, car il avait en vue les lecteurs auxquels étaient destinées ses traductions. Il a préféré à plusieurs reprises la fidélité formelle ou la rigueur de sens au profit d’une forme d’expression plus populaire, pour être sûr d’être compris pas les fidèles. »[12]

1.2.10. Si on traduit aussi des textes profanes à la même époque, a-t-on le même mode de traduire ?

On ne traduisait pas de textes profanes à la même époque (XVIe, XVIIe jusqu’au XIXe siècle), on ne peut donc pas analyser comparativement les procédés.

 

1.3. Le rôle culturel de la traduction

La traduction et la langue

1.3.1. Statut de la langue écrite à l’époque (existe-t-il une norme unique pour cette langue ? Coexistence éventuelle avec d’autres langues ? )

 Comme nous l’avons dit précédemment, le Missel de Gjon Buzuku de 1555 est le premier grand document écrit en langue albanaise. Donc, le statut de l’albanais à l’époque était celui d’une langue orale. Or, tous les scientifiques et les historiens de la langue albanaise sont d’avis qu’une langue écrite albanaise a dû exister bien avant ce document.[13] Les albanologues disent également que l’alphabet utilisé a été celui du latin.[14] Ce n’est qu’après la fin du Moyen Âge qu’on retrouve des documents albanais écrits dans les deux dialectes reconnus à l’intérieur de la langue albanaise: gege et toske.

Il faut dire que l’albanais était surtout une langue parlée, l’Albanie faisant partie (cinq siècle durant) de l’Empire ottoman, la langue officielle était le turc. Le XIXe siècle est le siècle de la vraie formation de la nation albanaise, du rapprochement des régions albanaises entre elles, de la convergence des dialectes sans que leurs particularités ne disparaissent. Pendant la deuxième moitié du XIXe siècle, les linguistes font de grands efforts pour l’unification de l’albanais écrit. La première école en langue albanaise a été créée en 1887.

1.3.2. Quel est le rôle de ces traductions dans le développement de la langue littéraire ?

Le rôle de ces traductions dans le développement de la langue albanaise est très important sur le plan historique car ce sont les premiere référence pour les textes suivants, traductions ou lettres originales du XVIIe et du XVIIIe siècle. Suite aux premières traductions en dialecte gege (en lettres latines) ou en dialecte toske (écrit en lettres latines et grecques), la traduction du Nouveau Testament par Konstandin Kristoforidhi en 1860 a été faite en « gege littéraire » qui est une langue intermédiaire entre les deux dialectes, fruit d’une volonté commune des intellectuels de l’époque de développer la langue albanaise qui se trouvait sous la pression de la langue officielle turque de l’Empire s textes en langue albanaise et ils sont considérés comme les monuments des lettres nationales. Ces traductions ont servi également dottoman, dont faisaient partie les territoires habités par la population albanaise.

1.3.3. Quelles sont les grandes phases de retraduction des textes religieux en fonction de l’évolution de la langue ?

1555 : premières traductions

XVIIe siècle : retraductions d’extraits par d’autres prêtres de l’Église catholique (Frang Bardhi, Pjeter Budi, Pjeter Bogdani, Leke Matranga).

XIXe siècle : retraductions suivis d’abécédaires explicatifs, faites sous le patronage de la Société Biblique Britannique pour les Pays Étrangers de Londres (BFBS), encouragées également par les Missionnaires Américains d’Istanbul.[15]

Première moitié du XXe siècle : ce sont les traductions des textes sacrés faites par Fan S. Noli qui dominent.

- 1994 : publication de la dernière retraduction de la Bible en version intégrale.

La traduction et la société

1.3.4. Qui sont les commanditaires ? Les destinataires ?

Pour les traductions du XVIe et XVIIe siècle il n’y a pas de vrais commanditaires. Les curés ressentent le besoin de textes liturgiques en langue nationale pour attirer les fidèles. Cependant, directement ou indirectement, cette activité est soutenue et encouragée par la curiae romaine et l’Église catholique, très intéressée à cette période par la  diffusion du message biblique et de la foi. D’une part pour faire face aux conflits avec les protestants et la doctrine de Luther, d’autre part, le christianisme craint fortement les hordes ottomanes qui approchaient des rives de l’Adriatiques et tentaient d’islamiser les populations des territoires qu’ils occupaient, dont les Albanais.

Pour ce qui est des destinataires, ils appartiennent à deux catégories : d’un côté ce sont les croyants, les fidèles pour lesquels les prêtres/traducteurs souhaitent rendre les textes liturgiques et les messes compréhensibles à l’écoute, de l’autre ce sont tous les curés qui n’ont pas le niveau, ni l’instruction requise pour lire et comprendre les textes en italien ou en grec et encore moins en latin. On pense donc leur offrir des textes en langue albanaise.

Les traductions du XIXe siècle ont été commanditées pour la plupart par Société Biblique Britannique pour les Pays Étrangers de Londres (BFBS) qui a financé la traduction et la publication des textes religieux. Les destinataires sont les fidèles et les prêcheurs mais aussi des hommes des lettres qui se nourrissaient surtout de littérature religieuse.

Les traductions de la première moitié du XXe siècle, qui ont été publiées aux USA, ont été initiées par le fondateur de l’Église Orthodoxe Albanaise qui en était également le traducteur. C’est lui qui essayait de trouver des financements et de dégager de l’argent afin de pourvoir son Église et ses fidèles en littérature religieuse.

1.3.5. Diffusion des traductions (mode de reproduction, ampleur de la diffusion) ?

La première traduction n’a pas été diffusée par une édition indépendante. Elle existe en un seul exemplaire. Les chercheurs [16] parlent d’une censure  de Rome qui, dans le cadre de ses conflits avec la Réforme, n’a pas permis la diffusion du texte liturgique dans une langue populaire.

Une partie des traductions du XIXe siècle (faites par Vangjel Meksi, Kostandin Kristoforidhi, les extraits traduits dans l’abécédaire par Naum Veqilharxhi) a été imprimée à Istanbul et à Corfou avec le financement de la Société Biblique Britannique pour les Pays Étrangers de Londres (BFBS) et diffusée en Albanie. Les données provenant des archives de la BFBS témoignent que les textes écrits en toske, dialecte du Sud, étaient mieux vendus et diffusés que ceux en gege, dialecte du Nord de l’Albanie. Or, une grande majorité de manuscrits n’a pu être publiée, ni diffusée. Ces manuscrits ont aujourd’hui une valeur documentaire et historique inestimable pour les lettres albanaises.

1.3.6. Réception critique éventuelle, débats suscités par les traductions ?

Jusqu’à la fin du XIXe siècle ces traductions et les publications des textes religieux n’ont pas suscité de critiques éventuelles, ni de débats. Sur un terrain aussi pauvre en textes écrits dans la langue nationale, ces efforts ne pouvaient qu’être très bien accueillis.

1.3.7. Des retraductions interviennent-elles pour des raisons idéologiques et/ou religieuses ?

Les traductions des textes religieux des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, comme on l’a expliqué précédemment, ont été faites à l’initiative des religieux qui souhaitaient être compris par leurs fidèles et élargir leur cercle en leur parlant dans la langue de tous les jours. Elles ont aussi été encouragées par les Églises catholique et orthodoxe qui espéraient établir ainsi une certaine résistance à l’islamisation des territoires peuplés par des Albanais, chrétiens avant l’arrivée des Turcs.

Au XIXe siècle, la philosophie des Lumières avait pénétré les esprits des intellectuels albanais, surtout ceux qui avaient été formés en Europe. Cette période correspond à ce qu’on appelle dans l’histoire de l’Albanie « la Renaissance albanaise ». Ils ont travaillé pour la réanimation de la langue albanaise en rejetant les langues étrangères (grecque, latine et slaves) dans le discours religieux et dans le discours officiel (le turc), d’où leurs efforts pour élaborer un albanais écrit à travers des traductions de textes religieux.

Avec le début du XXe siècle commence une ère nouvelle. L’écroulement de l’Empire ottoman, la proclamation de l'indépendance, en 1912, ont évidemment marqué fortement, et même influencé, le destin des lettres, des traductions et des publications albanaises.

Après l’indépendance et jusqu’en 1944 les textes traduits ont pris de l’ampleur dans le cadre d’un nouvel État albanais, malgré un niveau d’instruction très bas et l’absence d’écoles (quelques lycées et aucune institution d’enseignement supérieur).

Or, la fin de la deuxième guerre mondiale et les conjonctures politiques internationales ont fait venir au pouvoir le parti communiste. Une dictature parmi les plus dures s’est installée en Albanie et pendant presque un demi-siècle le plus sauvage des dictateurs, Enver Hoxha, a dirigé le pays dans l’isolement total, dans la censure absolue, abolissant toute forme institutionnelle, humaine, rituelle et même mentale de la religion, sans distinction de forme. L’année 1965 a marqué la mémoire du peuple albanais par la destruction des églises et des mosquées, par l’emprisonnement des prêtres et des imams. À compter de ce jour, les pratiques religieuses, les rituels à caractère religieux, les croyances mêmes, étaient condamnables par le Code pénal. Les textes religieux furent brûlés en places publiques. À partir de ce moment, il devint inimaginable de traduire et encore moins de publier ou diffuser tout texte de nature religieuse. Des efforts ont été faits par la diaspora albanaise, mais il était impossible de pénétrer le pays. Ceci continua jusqu’à la chute du communisme en 1990.

Il faut dire, par ailleurs, que la diaspora albanaise a joué un rôle important dans la traduction et la publication des textes religieux, chrétiens ou musulmans sans pouvoir pénétrer à l’intérieur du pays. Or, la population albanaise vivant au dehors des frontières administratives de l’Albanie, notamment au Kosovo et en Macédoine, ont traduit, publié et diffusé ces textes.


 

[1] ROQUES Mario, Recherches sur les anciens textes albanais, Paris 1932, p. 8.

[2] SKENDO Lumo, Diturija, (première édition 1909), Shtepia e Librit, Tirana, 2000, p.260.

[3] SHPUZA, Gazmend  Kur’an -i ne gjuhen shqipe at www.kuranifisnik.net 27.08.2006.

[4] LLOSHI, Xhevat, Introduction à l’édition: “Konstandin Kristoforidhi, BIBLA: (ne gegerisht) Kriesa, Te Dalete 1872”, editions Shoqeria Biblike Nderkonfesionale e Shqiperise, 2009, p.6.

[5] JORGAQI, Nasho, Jeta e Fan S. Nolit, tome II, OMBRA GVG, Tirana  2005, p. 393-404

[6] ROQUES, Mario, Recherches sur les anciens textes albanais, Paris, 1932, p. 17

[7] ÇABEJ, Eqrem, PRÉFACE du “Messil” de Gjon Buzuku, Editions universitaires, Universiteti Shteteror i Tiranes, Instituti i Historise e i Gjuhesise, Tirana, 1968, p. 33

[8] LLOSHI, Xhevat, Introduction à l’édition: “Konstandin Kristoforidhi, BIBLA: (ne gegerisht) Kriesa, Te Dalete 1872”, éditions Shoqeria Biblike Nderkonfesionale e Shqiperise, 2009, p. II

[9] ÇABEJ, Eqrem, “Shqipja ne kapercyell, Epoka dhe gjuha eGjon Buzukut”, Editions Çabej, Tirana 2006, p. 41.

[10] CABEJ, Eqrem, PRÉFACE du “Messil” de Gjon Buzuku, Editions universitaires, Universiteti Shteteror i Tiranes, Instituti i Historise e i Gjuhesise, Tirana, 1968, p 37

[11] “La particularité de Buzuku, qui le différencie du traducteur classique est qu’il traduit des extraits pour les dire lors de ses propres messes, pour les mettre à la disposition de ses confrères et non pas pour les publier comme des textes traduits destinés à être lus individuellement.” LLOSHI, Xhevat, Introduction à l’édition : Konstandin Kristoforidhi, BIBLA: (ne gegerisht) Kriesa, Te Dalete 1872”, editions Shoqeria Biblike Nderkonfesionale e Shqiperise, 2009, p. 4.

[12] ÇABEJ, Eqrem, “Shqipja ne kapercyell – Epoka dhe gjuha e Gjon Buzukut”,  Editions Çabej, Tirana 2006, p 73 (albanais dans l’original, traduction de l’extrait par Mirela Kumbaro).

[13] Voir Sufflay in “Ungarische Rundschau 5” (1916) 6 (JIRECEK, BARTOLI)

[14] DURHAM M. Edith, « Some Tribal Origins, Laws and Customs of the Balkans » 1928, p 16.

[15] LLOSHI, Xhevat, Introduction à l’édition: “Konstandin Kristoforidhi, BIBLA: (ne gegerisht) Kriesa, Te Dalete 1872”, éditions Shoqeria Biblike Nderkonfesionale e Shqiperise, 2009, p 9.

[16] J. TOMIC, “Hylli i Drites”, VI  Shkoder, 1930, p 143