Auteur : Martin Carayol

 

1.1. Cadre général introductif

1.1.1. Quel est le premier texte traduit ?

Dans son Abckirja de 1543, contenant un abécédaire et un catéchisme, Mikael Agricola (1510-1557) introduisit de nombreuses traductions de textes bibliques, comme dans son Rukouskirja (livre de prières) en 1544. Son premier ouvrage consistant en une traduction systématique sera le Nouveau Testament en 1548.

1.1.2. À quelle époque commence-t-on à traduire les textes religieux dans votre langue ?

Dans les années 1540, avec les traductions d’Agricola.

1.1.3. Date de la première traduction intégrale de la Bible ?

La première Bible complète en finnois date de 1642. Elle s’inspire principalement de la Bible suédoise dite « de Gustave Vasa » de 1618 (elle-même inspirée de la première Bible suédoise complète de 1541). On n’y retrouve plus les traits hérités des dialectes orientaux qui subsistaient dans l’écriture d’Agricola.

 

1.2. La pratique de la traduction

Qui traduit ?

1.2.1. Qui sont les traducteurs (formation, langue maternelle, statut social, quelles sont leurs conditions de travail ? Sont-ils reconnus en tant que traducteurs, s’agit-il de leur activité principale ? Etc.) ?

Agricola était un pasteur, proche de l’évêque de Turku, charge dont il hérita en 1554. Sa langue maternelle est l’objet de nombreuses études contradictoires : il semble qu’il ait été suédophone mais qu’il ait très tôt appris le finnois.

Par la suite, presque tous les traducteurs de textes religieux ont été des gens d’Église, issus de familles bourgeoises ; on compte quelques bourgeois.

Pour la plupart, les traducteurs ont étudié à Turku et exercé leur charge de pasteur dans la même région : c’est, par exemple, le cas des auteurs des deux premiers livres d’hymnes officiels de 1583 et 1605, Jacobus Finno et Hemming de Masku. Johannes Gezelius, auteur en 1666 d’un important catéchisme tiré de celui de Luther, a été évêque de Turku : il a la particularité d’être issu d’une famille paysanne de Suède.

Que traduit-on ?

1.2.2. Quels types de textes religieux traduit-on ?

Parmi les livres religieux en finnois contenant des traductions de textes religieux, on compte des catéchismes, des livres de dévotion et des livres d’hymnes.

1.2.3. Traduit-on à la même époque des textes profanes ?

Très peu. On ne peut guère signaler que le recueil de devinettes de Christfried Ganander en 1783, et quelques livres relevant du domaine scientifique ou moral, comme le De civilitate morum puerilium (ouLibellus aureus) d’Erasme, datant de 1530, traduit en finnois en 1670. La Loi fut traduite en 1759, avec de nombreux traits suédois : c’était une adaptation de la loi suédoise de 1734.

Comment traduit-on ?

1.2.4. À partir de quel texte-source ?

Agricola s’est servi des traductions de la Bible en suédois et en allemand, de la version grecque publiée par Erasme, de la traduction latine de ce dernier, et plus marginalement de la Vulgate.

1.2.5. De quelle(s) langue(s) traduit-on ?

On traduit principalement du latin et du suédois. Le livre d’hymnes de Jacobus Finno, par exemple, en 1583, se fonde sur un modèle suédois ; quelques hymnes seulement sont traduits du latin, d’autres de l’allemand. Le troisième recueil d’hymnes officiel, celui de 1701, reprit les deux précédents (Finno et Hemming) s’inspira lui aussi d’un recueil suédois, auquel on emprunta surtout des hymnes traduites de l’allemand.

Les livres de dévotion, très nombreux au XVIIIe siècle, étaient presque tous traduits du suédois, même quand l’original était en allemand, danois ou anglais.

1.2.6. Passe-t-on par une langue relais ?

De manière très ponctuelle seulement, comme dans les cas que nous venons d’évoquer du troisième recueil d’hymnes ou des livres de dévotion, ou bien pour des livres anglicans comme ceux de John Bunyan (The Pilgrim’s progress) et Arthur Dent (The Plain Man's Pathway to Heaven), qui ont été traduits par le biais de la version allemande.

1.2.7. Si oui, celle-ci est-elle orale ou écrite ?

Il n’est pas fait état dans nos sources d’une langue orale servant de relais.

1.2.8. Les traducteurs privilégient-ils un mode de traduire littéral pour les textes religieux ?

Oui. Agricola, qui se permettait des libertés quand il traduisait des textes non bibliques, était parfaitement fidèle aux textes bibliques.

1.2.9. Comment justifient-ils leur pratique ?

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1.2.10. Si on traduit aussi des textes profanes à la même époque, a-t-on le même mode de traduire ?

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1.3. Le rôle culturel de la traduction

La traduction et la langue

1.3.1.Statut de la langue écrite à l’époque (existe-t-il une norme unique pour cette langue ? coexistence éventuelle avec d’autres langues ?)

Le finnois ne sera unifié que bien après cette époque, à la fin du XIXe siècle. La langue écrite est alors très influencée par le dialecte de Turku, mais également par les langues étrangères : les plus importantes spécificités du finnois, comme le participe à agent, sont négligées et on emploie à l’inverse des tournures calquées sur le suédois (futur analytique, verbes à particules, utilisation du participe passé passif comme adjectif…), l’autre langue écrite du pays.

Au fil des remaniements de la Bible de 1642 (en 1685, 1758, 1776, 1938), la langue devient plus juste. La Bible de 1776 sera utilisée jusqu’en 1938 et aura une influence considérable sur le finnois littéraire.

1.3.2. Quel est le rôle de ces traductions dans le développement de la langue littéraire ?

La langue biblique constituera longtemps un modèle pour la langue littéraire, même si on cherchera, au XIXesiècle, à amoindrir son influence en cultivant une manière plus naturelle d’écrire le finnois, par les traductions de textes littéraires notamment.

Même la Bible de 1938 se fonde largement, du point de vue linguistique, sur les éditions qui l’ont précédée ; le poète Pentti Saarikoski dira de cette langue biblique, de ce « jargon spirituel », qu’ « on le ressent mais on ne le comprend pas ».

1.3.3. Quelles sont les grandes phases de retraduction des textes religieux en fonction de l’évolution de la langue ?

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La traduction et la société

1.3.4. Qui sont les commanditaires ? Les destinataires ?

Les autorités religieuses étaient soucieuses de toucher un public le plus large possible, comme en atteste la Bible de 1685, largement fondée sur celle de 1642 mais en format maniable, de manière à pouvoir être utilisée par les armées en campagne.

1.3.5. Diffusion des traductions (mode de reproduction, ampleur de la diffusion) ?

Les livres de dévotion rencontraient, semble-t-il, un assez grand succès, surtout au XVIIIe siècle : il en existait alors une cinquantaine, certains écrits directement en finnois. Ceux qui étaient traduits ont été souvent réédités aux XVIIe et XVIIIe siècles.

1.3.6. Réception critique éventuelle, débats suscités par les traductions?

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1.3.7. Des retraductions interviennent-elles pour des raisons idéologiques et/ou religieuses ?

Source principale

RIIKONEN H. K., KOVALA Urpo, KUJAMÄKI Pekka, PALOPOSKI Outi (dir.), Suomennoskirjallisuuden historia, 2 vol., Helsinki : SKS, 2007.